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L'identité de la BnF

François Mitterrand annonce le projet d'une bibliothèque dont l'identité reste à définir...

« Je veux une bibliothèque qui puisse prendre en compte toutes les données du savoir dans toutes les disciplines et surtout qui puisse communiquer ce savoir à l’ensemble de ceux qui cherchent, qui étudient, de ceux qui ont besoin d’apprendre, toutes les universités, les lycées, tous les chercheurs qui doivent trouver un appareil modernisé, informatisé et avoir immédiatement le renseignement qu’ils recherchent »

François Mitterrand, Entretien télévisé, TF1, 14 juillet 1988

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La Bibliothèque nationale des années 1980. Un « ghetto de la culture » ?

Jan van Eyck [Public domain], via Wikimedia Commons

Lorsque, le 14 juillet 1988, le président François Mitterrand annonce son projet de nouvelle bibliothèque, c’est avant tout en réponse à un bilan alarmiste de la situation de la BN.  La presse des années 1980 parle ainsi d’une « vieille dame qui croule » et de « trésors engloutis ». De nombreux rapports, comme celui d’André Miquel, qui prend ses fonctions d'administrateur général de l’institution en 1981, et celui de Francis Beck, chargé de mission par le ministre François Léotard en 1987, dressent ainsi le portrait d’une institution qui ploie sous la faiblesse des moyens humains, la désuétude de ses ressources techniques, comme de ses structures administratives et juridiques.

La définition du projet: « BN bis » ou  « Très Grande Bibliothèque » ?

A la suite de ces constats alarmistes, de nombreuses propositions sont faites, qui reflètent la diversité des conceptions quant à la modernisation de l’établissement. Dès 1986, sont ainsi envisagées des solutions de délocalisation d’une « BN bis », pour répondre à l’accusation faite à l’institution de n’être que la « super bibliothèque de Paris », un « ghetto culturel » selon l’historien Jean-Yves Guiomar. En mars 1988, Emmanuel Le Roy Ladurie propose sa propre conception de l’établissement dans son rapport La Bibliothèque nationale. Cette vision, très réformiste, insiste sur la nécessité de préserver l’identité d’une bibliothèque patrimoniale qui ne doit pas devenir un « second Beaubourg », faisant référence à la Bpi. De fait, il s’agirait plutôt de bâtir un nouvel établissement destiné à accueillir le dépôt légal des imprimés. Ainsi, ce premier projet s’affirme d’abord comme le résultat d’une volonté de désengorger la BN.

 

Toutefois les projets de Jacques Attali comme de François Mitterrand - une bibliothèque numérique « de l’an 2050 » - laissaient à craindre une marginalisation de l’ancien établissement, voire le délaissement de ses collections, au profit d’une institution à part, une « super bibliothèque » comme vitrine de la France.

 [Public domain], via Wikimedia Commons

« Alexandrie plus l’informatique ». Première bibliothèque du XXIe ou dernière bibliothèque du XXe siècle?

Le projet, tel qu’il est défini par le président, se concentre autour de différents axes.  En effet, son discours évoque les lignes d'une bibliothèque entre héritage des Lumières (par sa propension encyclopédique), modernisation (par les nouveaux médias) et rêve d’une bibliothèque européenne (par l’importance de la mise en réseau).  Cette démarche se situe dans la continuité d’un mouvement général de rénovation des bibliothèques françaises et de la BN, sans pour autant que l’annonce le précise explicitement. Seule la lettre du 28 juillet 1988, adressée au premier ministre, est à considérer comme une charte qui confirme un attachement au triptyque « livre, site moderne et informatisation accrue ».  

 

C’est précisément ce qui constitue le cœur du rapport de Patrice Cahart  (directeur du département des Monnaies, Médailles et antiques) et de Michel Melot (directeur de la Bpi), Proposition pour une Grande Bibliothèque, de juillet 1989.  Il s’agissait de constituer un établissement bicéphale composé d’un « Haut-de-jardin » dédié au grand public et d’un « Rez-de-jardin ». réservé aux chercheurs.

 

Le projet défendu par P. Cahart et M. Melot est complété par la nécessité de développer un réseau qui rassemble l’ensemble des bibliothèques françaises. Le réseau NUMERIS de partage et de normalisation des données est mis en place dans cette perspective ; il est associé à la mise en œuvre d’une utilisation généralisée des technologies de l’information et de la communication : informatisation du catalogue depuis les années 1970, usage du CD-Rom et disponibilité sur Minitel.  

 

Face à l’ampleur d’un tel projet, de nombreuses polémiques émergent. Une véritable cabale s’organise contre un projet qualifié de « pharaonique », perçu comme un outil de promotion de la présidence de François Mitterrand et un gouffre financier. Certains milieux intellectuels français, et même internationaux, s’insurgent aussi contre le manque de clarté en ce qui concerne la destination de la nouvelle bibliothèque et la nature de ses collections.

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